Comment comprendre le commandement qui nous appelle à aimer Dieu ?

J’ai toujours aimé les paraboles, car je sais qu’il y a des choses qu’on ne peut expliquer, on peut seulement les raconter. Toutes les religions ont fait appel aux paraboles qui ont une portée spirituelle. En proposant un chemin, elles invitent chaque auditeur à les entendre à partir de sa propre histoire.

J’ai un cahier avec plus de mille paraboles que j’ai glanées au fil de mes lectures. Je me propose dans cette rubrique de mon blog d’en rapporter quelques-unes qui me paraissent particulièrement éloquentes.

La confession de foi d’Israël commence par : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu », qui est aussi le premier commandement selon Jésus. Que veut dire aimer Dieu ? Un apologue qui nous vient de l’Islam peut nous aider à réfléchir à cette question.

Il y avait à Bassorah, une femme qui s’appelait Radia. Elle se promenait dans les rues de la ville avec un seau rempli d’eau dans une main et une torche dans l’autre. On lui demande pourquoi : « La torche, c’est pour mettre le feu au paradis, et l’eau, c’est pour éteindre les flammes de l’enfer, afin que Dieu soit aimé pour lui-même. »

Cet apologue interroge la motivation de notre foi. Pourquoi, pour quoi, essayons-nous de vivre l’Évangile ? Est-ce gratuitement, parce que Dieu est Dieu, ou pour en tirer quelques satisfactions spirituelles.

Pour illustrer cette alternative, Maître Eckart a écrit : « Certaines gens veulent regarder Dieu comme ils regardent une vache, avec les mêmes yeux ; ils veulent aimer Dieu comme on aime une vache. Tu aimes celle-ci pour le lait et le fromage et pour ton propre avantage. Ainsi font toutes ces personnes qui aiment Dieu pour la richesse extérieure ou la consolation intérieure. Ils n’aiment pas vraiment Dieu, ils aiment leur propre avantage. »

Si l’Évangile est une parole de grâce, je suis invité à entrer dans la logique de la grâce, et à aimer Dieu gratuitement, à être fidèle gratuitement.

Une belle illustration de la gratuité de la foi se trouve dans le roman de Zvi Kolitz qui rapporte la lettre qu’un des derniers combattants du ghetto de Varsovie écrit à Dieu. Elle se termine de la façon suivante : « Quand j’étais jeune, mon rabbi m’a maintes fois raconté l’histoire d’un Juif qui, avec sa femme et leur enfant, a fui l’inquisition espagnole. Il a pris la mer à bord d’un petit bateau, et réussi malgré la tempête à gagner un îlot rocailleux. Là, un éclair foudroie sa femme. Puis une tornade emporte l’enfant dans les flots. Seul, malheureux comme les pierres, les mains levées vers le ciel, le Juif s’adresse à Dieu : “Dieu d’Israël, j’ai fui jusqu’ici pour pouvoir te servir librement, pour observer tes commandements et sanctifier ton nom. Mai toi, tu fais tout pour m’empêcher de croire en toi. Cependant, si tu penses réussir à me détourner du droit chemin par ces épreuves, je te crie : Tu en seras pour ta peine. Tu as beau m’offenser et me fustiger, je croirai toujours en toi“. »