Le pape et les armes nucléaires… vus de France

Comme souvent, le pape François a eu une parole juste en interpellant les dirigeants de la planète pour leur dire que le temps était venu de renoncer à la dissuasion nucléaire : « Un monde sans armes nucléaires est possible et nécessaire ».

Rappelons les données du dossier pour notre pays. La France possède environ 300 têtes nucléaires dont la puissance est 10 à 20 fois supérieure à celle de la bombe d’Hiroshima. Chacune de ces têtes est capable de raser une ville comme Paris, ce qui est une perspective effroyable.

Comme aucun argument éthique raisonnable ne justifie l’utilisation d’une telle arme, la seule justification est la dissuasion. C’est elle qui a conduit notre pays à se doter de l’arme nucléaire au temps de la guerre froide. Depuis, le monde a changé, mais la doctrine n’a pas évolué et  les armes sont restées. Si aujourd’hui, notre pays n’était pas doté de l’arme nucléaire, serait-il plus en danger ? Considérerait-il comme une urgence absolue de devenir une puissance nucléaire ? Qu’en pensent les Polonais les Allemands, les Espagnols et les Australiens qui sont dans cette situation ?

Ces questions méritent d’être posées, pourtant elles ne le sont pas. Je ne me souviens pas que le sujet ait été évoqué par un seul des candidats aux dernières élections présidentielles. La Fédération protestante qui s’était souvent exprimée sur le sujet dans les années 70 est totalement silencieuse sur cette question depuis des décennies.

Les traités internationaux de non-prolifération reposent sur un constat parfaitement hypocrite. Les nations nucléaires peuvent le rester, mais celles qui ne le sont pas n’ont pas le droit de le devenir. Autrement dit, notre pays qui est reconnu comme une puissance nucléaire est d’une parfaite arrogance en disant : « faites ce que je dis, pas ce que je fais. » Qui peut se reconnaître dans cette attitude ?

Parce que nous nous sommes habitués à une situation profondément injuste, le pape est dans son rôle quand il soulève des questions que tout le monde préfère oublier. Tous les gens raisonnables sont d’accord pour dire que l’urgence est d’aller vers un désarmement, mais qui donnera l’exemple ? J’aimerais que le débat soit posé dans notre pays… mais je ne me fais guère d’illusions.