Dire Dieu

Gerd Theissen est un bibliste de réputation mondiale qui cherche à lancer des ponts entre ses recherches bibliques et le témoignage de la foi. Dans un article, il s’en était pris aux exégètes qui trouvaient indigne de chercher le sens d’un texte biblique. Contre cette position, il a écrit un livre pour essayer de dire la foi aujourd’hui[1].

De nos jours, la foi ne va pas de soi. La sécularisation et la mondialisation ont rendu sa formulation plus difficile. Ajoutons qu’il y a de moins en moins d’intellectuels chrétiens qui stimulent et enrichissent notre réflexion et que les théologiens restent trop souvent dans leur zone de confort de l’entre-soi.

Le livre de Theissen se présente comme une succession de questions-réponses dans la lignée des catéchismes de la réforme, sauf que les réponses ne sont pas des affirmations autoritaires, mais des propositions qui stimulent notre réflexion. Dans une perspective protestante, le but d’un catéchisme n’est pas d’asséner un savoir fermé, mais d’aider le lecteur à poser ses propres mots pour dire la foi. Comme on est toujours plus intelligent à plusieurs, il n’est pas vain de se mettre à l’écoute de ceux qui ont passé leur vie à travailler le sujet.

J’ai déjà dit ma compréhension de la foi en 700 pages (Un catéchisme protestant), et en 100 pages (Lettre à mon gendre agnostique pour lui dire la foi chrétienne). Stimulé par Theissen, je me propose de la dire en dix lignes et trois affirmations.

  1. La vie est plus grande que ce que je vois. La beauté, l’espérance, la bonté, les coïncidences étonnantes, l’émotion, l’étonnement, l’ineffable… sont autant de petits cailloux qui m’invitent à m’interroger sur la possibilité d’une vie plus grande que la vie.
  2. Les mouvements spirituels cherchent à mettre des mots sur cette vie plus grande que la vie. La singularité du christianisme est qu’il se met à l’écoute du récit biblique. Ce dernier dit deux choses : Dieu est entré dans notre histoire, il m’accompagne dans les méandres de mon chemin de vie, il est libérateur par la grâce et dans le pardon. Dieu est amour, ma vie a du prix à ses yeux, je ne suis pas l’enfant du hasard et de la nécessité, mais mon existence est précédée par le désir de Dieu et elle s’achèvera dans son amour.
  3. Cette découverte m’invite à l’écoute et au changement de comportement afin de réorganiser ma vie autour de ces deux piliers que sont l’amour et la libération, la grâce et le pardon.

Tout le reste est commentaire.

[1] Gerd Theissen, Questions de foi, dire le christianisme autrement, Olivétan/Salvator, 2021.